Vladimir Putin et Emmanuel Macron

Syrie : L’opération humanitaire de Macron avec l’aide de la Russie

L’opération d’aide humanitaire franco-russe de la semaine dernière en Syrie indique un changement dans la diplomatie française en direction de Damas. Plus tôt, un magazine, citant des sources diplomatiques, indiquait que la mission humanitaire était l’idée du Palais de l’Elysée et non du ministère français des Affaires étrangères.

Christian Chesnot, considéré comme l’un des principaux experts français sur le Moyen-Orient, a déclaré qu’il considère que l’information dans le magasine « Libération » est fiable et a expliqué les arguments possibles du leader français.

Selon le journaliste, Emmanuel Macron a toujours, plus ou moins gardé le contrôle sur le sujet de la Syrie. Néanmoins, cette décision de mener une opération humanitaire conjointe avec la Russie indique un changement dans l’orientation de la politique diplomatique de la France en Syrie.

Pour lui, la nomination du 27 juillet dernier, de François Sénémaud, ancien directeur du renseignement à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), en tant que représentant personnel de Macron pour la Syrie, en est la confirmation. En effet, Sénémaud, qui prend ses fonctions le 27 août, est actuellement ambassadeur de France en Iran. Ironiquement, depuis 2014, le dossier syrien au ministère français des Affaires étrangères est supervisé par Franck Gellet, nommé ambassadeur au Qatar. Par ailleurs, Christian Chesnot note qu’Emmanuel Macron a récemment eu deux rencontres avec Poutine : d’abord le 24 mai, puis lors de la finale de la Coupe du Monde de la FIFA 2018 le 15 juillet.

Qu’est-ce qui explique ce changement vis-à-vis de la Syrie ?

Depuis le début du conflit en Syrie en 2011, la diplomatie française a presque toujours suivi Washington et s’est rangée contre Damas. Pas plus tard qu’en avril, la France a joué un petit rôle dans le bombardement par les États-Unis et le Royaume-Uni. La mission visait à détruire plusieurs installations gouvernementales en Syrie après l’attaque présumée d’armes chimiques du gouvernement syrien à Duoma.

Christian Chesnot, discutant sur les décisions de la France sur la SyrieSelon l’expert français, le rapprochement avec Moscou s’explique par une vision pragmatique de la situation :
« La Russie a gagné en Syrie. C’est un fait. Damas a repris le contrôle de la quasi-totalité du territoire du pays ; les insurgés du sud ont été pratiquement détruits. La France s’est retrouvée hors jeu et veut retourner en Syrie. Emmanuel Macron vient de regarder la situation d’un point de vue pragmatique et s’est dit qu’une nouvelle étape commence. Une étape, où il est nécessaire de reprendre les relations avec la Russie. »

Et l’opération humanitaire a fourni une excellente occasion d’amorcer un rapprochement selon lui. Car depuis le début du conflit, la diplomatie française a eu deux points forts : l’observation des lignes rouges, en ce qui concerne l’utilisation des armes chimiques, et l’envoi d’aide humanitaire. Cette opération conjointe avec la Russie donne au président français l’occasion de reprendre le dialogue sans perdre la face.

Dans ce scénario, tout le monde y gagne dit Christian Chesnot, assurant que les Russes soient satisfaits du rapprochement possible avec la France. « Moscou aura besoin d’alliés pour reconstruire la Syrie, peu importe si un changement de pouvoir se produise ou non. La Russie ne pourra pas tout faire seule », explique le journaliste.

Et qu’en est-il du « lobby néo-conservateur » au sein du ministère des Affaires étrangères français, qui, comme l’a dit Chesnot, est composé de « sympathisants de l’OTAN et de sympathisants américains hostiles à l’Iran et au gouvernement syrien ?

Eh bien, selon l’expert, même s’ils regardent avec désapprobation le rapprochement avec Moscou, ils seront contraints de soutenir le Palais de l’Elysée car ils n’ont pas d’autre choix. « En tout cas, le pays qui les concerne le plus est l’Iran « , a-t-il conclu.

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