La chancelière allemande Angela Merkel se battait mardi pour mettre fin à la première grande querelle au sein de sa coalition, alors qu’elle négocie un vaste accord européen sur le droit d’asile.
Un conflit concernant la politique d’immigration
La discorde au sein de son groupe a éclaté au grand jour lorsque le ministre de l’Intérieur, Horst Seehofer, des alliés bavarois de Merkel, a rapidement annulé la présentation de son « masterplan » sur l’immigration. Le ministère de l’Intérieur a déclaré dans une courte déclaration que la présentation avait été repoussée parce que « plusieurs points doivent encore être convenus ».
Seehofer, ancien premier ministre de l’État conservateur de Bavière, a longtemps été l’un des critiques les plus féroces de la décision de Merkel d’ouvrir les frontières de l’Allemagne au moment où la crise migratoire de l’Europe atteint son paroxysme en 2015.
Depuis, l’afflux de migrants a marqué la politique allemande. Les électeurs ont remis à Merkel le pire résultat qu’elle ait jamais obtenu lors des élections de septembre, ainsi que les sièges d’extrême droite de l’Agence Française de Développement (AFD) pour la première fois à l’assemblée parlementaire de la République fédérale d’Allemagne.
À l’approche des élections cruciales en Bavière durant le mois d’octobre, Seehofer et son parti, l’Union chrétienne-sociale, sont impatients d’arrêter l’hémorragie de soutien à l’AFD anti-migrant et islamophobe. La stratégie de l’Union chrétienne-sociale s’appuie sur le plan d’immigration en 63 points de Seehofer, ancré par la proposition clé de repousser les migrants de l’autre côté de la frontière.
Seehofer a souligné que les 63 points de son plan sont nécessaires pour rétablir le contrôle et l’ordre en Allemagne lundi soir. Il a ajouté qu’il ne « publierait pas un plan à moitié cuit avec des compromis paresseux ».
Soulignant ce qui est en jeu, les média ont déclaré que si aucun accord n’est trouvé les choix du ministre de l’Intérieur seraient la démission ou le renvoi. Bien sûr, ce serait la fin de la coalition.
Il faut les rendre à leur pays
Depuis 2015, l’arrivée de plus d’un million de demandeurs droit d’asile, dont beaucoup fuient la Syrie et l’Irak déchirés par la guerre, a profondément divisé l’Allemagne. Trois ans après l’éclatement de la crise migratoire, l’afflux s’est considérablement ralenti, mais la coalition continue de se chamailler au sujet de ce qui serait une solution durable.
Pour le chancelier, la seule solution durable serait un accord à l’échelle européenne. C’est un point sur lequel elle insistera probablement lorsqu’elle rencontrera mardi prochain le chancelier autrichien, Sebastian Kurz, dont le pays serait le plus durement touché si l’Allemagne fermait ses portes. Ironiquement, Kurz partage les critiques de Seehofer à l’égard de la politique de Merkel en matière de réfugiés et doit rencontrer le ministre de l’Intérieur mercredi.
Merkel a pour l’instant le soutien du troisième parti de sa coalition, le Parti social-démocrate. Elle rejette également le renforcement des contrôles aux frontières des demandeurs du droit d’asile, ce qui va à l’encontre de l’esprit de la zone sans passeport Schengen.
Attendre la réforme
L’afflux de réfugiés n’a pas seulement influencé les décisions électorales dans la plus grande économie d’Europe. Mais il a également poussé les électeurs à choisir les populistes et l’extrême droite en Autriche ainsi qu’en Italie. Le ministre italien d’extrême droite de l’Intérieur, Matteo Salvini, a refusé catégoriquement d’autoriser un navire de sauvetage transportant des centaines de migrants à accoster lundi.
Les exigences des forces populaires et d’extrême droite compliquent les efforts de Merkel en faveur de la solidarité de l’UE concernant l’immigration. La question sera abordée lors des sommets le 28 et 29 juin.
Avec la prise en charge par l’Autriche de la présidence de l’UE au 1er juillet, Merkel espère convaincre Kurz d’adhérer à un système de « solidarité flexible » et de contribuer à la mise en place d’une police des frontières européenne efficace.
Guenther Oettinger, membre du parti de Merkel, a fait appel à la patience de Seehofer. « Il serait bon que l’Allemagne attende de voir ce qu’apporte la réforme des règles de Dublin à Bruxelles, avant de prendre des mesures unilatérales », a-t-il déclaré au groupe de presse, faisant référence aux règlements concernant les procédures de demande du droit d’asile.